đ° Les Ambassades du Siam en France (1686 et 1861) : Quand Versailles puis Fontainebleau, et Ayutthaya puis Bangkok (Capitale Siamoise depuis 1769) se rencontrent
DĂ©couvrez lâhistoire fascinante des ambassades du Siam en France sous Louis XIV et NapolĂ©on III. Deux rencontres historiques, en 1686 et 1861, entre la cour de Versailles et le royaume de Siam, futur ThaĂŻlande
royaume de Siam, futur ThaĂŻlande.
đ LâAmbassade du Siam Ă Versailles en 1686 : La rencontre du Roi-Soleil et du roi NaraĂŻ
En 1686, la cour de Louis XIV accueille avec Ă©clat les ambassadeurs du roi de Siam, Phra NaraĂŻ. Cette visite spectaculaire avait pour but de renforcer les liens diplomatiques entre la France et le Siam, et de contrer lâinfluence des Hollandais en Asie.
Ă cette Ă©poque, le Siam (aujourdâhui la ThaĂŻlande) Ă©tait une puissance majeure dâAsie du Sud-Est, admirĂ©e pour sa culture raffinĂ©e, sa tolĂ©rance religieuse et sa richesse. Le roi NaraĂŻ, dĂ©sireux dâun alliĂ© europĂ©en, choisit la France, encore peu impliquĂ©e dans les rivalitĂ©s coloniales.
Le 1er septembre 1686, les trois ambassadeurs siamois furent reçus à Versailles dans un cérémonial grandiose. Plus de 1 500 personnes assistÚrent à cette rencontre entre deux monarchies absolues.
Les Siamois se prosternĂšrent selon leur coutume devant le Roi-Soleil, qui, en geste exceptionnel, leur permit de lever les yeux sur lui.
MalgrĂ© la curiositĂ© mutuelle et la volontĂ© dâĂ©changes commerciaux, la mort du roi NaraĂŻ en 1688 et lâaccession au pouvoir du gĂ©nĂ©ral Pitracha mirent fin Ă cette ouverture : le Siam se ferma durablement Ă lâEurope, Ă lâexception des Hollandais.
đ Le Renouveau des Relations Franco-Siamoises au XIXá” siĂšcle
PrĂšs de deux siĂšcles plus tard, le roi Mongkut (Rama IV), montĂ© sur le trĂŽne en 1851, entreprend une vaste politique de modernisation. Il cherche Ă ouvrir le royaume du Siam au commerce international, notamment avec la France, lâAngleterre et les Ătats-Unis.
Le consul Charles-Louis de Montigny signe en 1856 un traitĂ© dâamitiĂ© et de commerce garantissant la libertĂ© du commerce et des missions religieuses. Cet accord, favorable Ă la France, inquiĂšte la Grande-Bretagne, qui craint de perdre son influence dans la rĂ©gion.
Pour consolider ces nouveaux liens diplomatiques, le roi Mongkut dĂ©cide dâenvoyer une ambassade en France et au Vatican en 1861.
đą LâAmbassade siamoise de 1861 : Voyage, accueil et Ă©merveillement
Trois ambassadeurs â Rajikosa Thipusi, Phra NavaĂŻ et Phra Narong â quittent Bangkok Ă bord du navire La Gironde. AprĂšs une traversĂ©e longue et pĂ©rilleuse, ils accostent Ă Toulon oĂč un accueil impĂ©rial leur est rĂ©servĂ© : pavillons hissĂ©s, salves de canon et cĂ©rĂ©monial militaire impressionnent les visiteurs.
InstallĂ©s Ă Paris, ils sont logĂ©s aux Champs-ĂlysĂ©es et invitĂ©s Ă dĂ©couvrir la puissance industrielle et culturelle de la France :
- Arsenal de Toulon,
- Manufactures de Lyon,
- MusĂ©um dâHistoire naturelle,
- BibliothÚque impériale,
- Imprimerie impériale.
Les Parisiens, fascinĂ©s par leurs costumes somptueux et leur maintien solennel, se pressent pour les apercevoir. Lâambassade siamoise devient un vĂ©ritable Ă©vĂ©nement mĂ©diatique de lâĂ©poque.
đ La RĂ©ception Ă Fontainebleau : NapolĂ©on III et lâEmpereur du Siam
Le 27 juin 1861, les ambassadeurs sont reçus par NapolĂ©on III et lâimpĂ©ratrice EugĂ©nie au chĂąteau de Fontainebleau.
La cĂ©rĂ©monie, immortalisĂ©e par le peintre Jean-LĂ©on GĂ©rĂŽme dans le cĂ©lĂšbre tableau La RĂ©ception des ambassadeurs siamois, reste lâun des moments les plus spectaculaires du Second Empire.
Les diplomates siamois, suivant le protocole traditionnel, se prosternÚrent à trois reprises avant de remettre les lettres royales au souverain français.
LâimpĂ©ratrice, parĂ©e des diamants de la couronne, reçut en retour des prĂ©sents royaux : objets dâorfĂšvrerie, rĂ©pliques des regalia, et un tableau du Bouddha dâĂ©meraude.
Cette rencontre solennelle, observĂ©e avec curiositĂ© et parfois ironie par les contemporains (notamment Prosper MĂ©rimĂ©e), symbolisait le dialogue entre deux mondes : la monarchie orientale et lâempire occidental moderne.


đïž Le Retour Ă Bangkok et lâHĂ©ritage Diplomatique
à la fin de leur séjour, les ambassadeurs quittent la France en septembre 1861, emportant les décorations et présents de Napoléon III.
Le roi Mongkut reçoit la grand-croix de la LĂ©gion dâhonneur, et son interprĂšte, lâabbĂ© Larnaudie, est Ă©galement dĂ©corĂ©.
AprÚs une escale à Rome pour rencontrer le pape, la délégation regagne Bangkok en décembre 1861.
MalgrĂ© lâĂ©clat de cette mission, les relations franco-siamoises demeurent limitĂ©es jusquâĂ la signature du traitĂ© du 15 juillet 1867, par lequel le Siam reconnaĂźt le protectorat français sur le Cambodge.
đ§ Une Diplomatie entre CuriositĂ© et Prestige
Les deux ambassades du Siam en France, en 1686 et 1861, illustrent lâĂ©volution du dialogue entre lâEurope et lâAsie :
- celle de Versailles symbolise la fascination mutuelle entre deux monarchies absolues ;
- celle du Second Empire marque lâentrĂ©e du Siam dans le monde diplomatique moderne.
Ces Ă©changes, empreints de curiositĂ© et de respect, rappellent que les relations entre la France et la ThaĂŻlande reposent sur une histoire sĂ©culaire de diplomatie, de culture et dâouverture.


