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Les Derniers Souffles de la Forêt

Chronique de la terre qui se dérobe

Dans le cœur vibrant du sud thaïlandais, là où les collines s’enveloppent de brume à l’aube et où les arbres sculptent des silhouettes d’ancêtres, vit un peuple dont l’histoire ressemble au murmure persistant d’un monde en disparition : les Maniqs, peuple autochtone de chasseurs-cueilleurs, établis dans les provinces de Satun, Trang et Phattalung.

Ils sont peu nombreux, à peine quelques centaines, mais chacun porte une mémoire profonde, enracinée comme les grands banians. Ils avancent sous les ombres mouvantes avec la légèreté de ceux qui n’ont jamais voulu posséder la terre mais simplement la respirer. Aujourd’hui pourtant, ils défendent le droit de demeurer là où leurs ancêtres ont vécu, rêvé, souffert et transmis, là où leurs pas ont tissé la route du monde depuis des générations.

La forêt thaïlandaise, jadis vaste et vibrante, bruissait pour eux comme une mère. Elle offrait nourriture, abri, savoirs et récits. Maintenant, ce sanctuaire est découpé en lois, en limites, en zones protégées où l’homme — surtout celui qui dérange parce qu’il est pauvre, invisible ou indigène — devient un intrus.

Le paradoxe est cruel :
ceux qui ont le moins altéré la nature sont accusés de la menacer.

Ainsi commence, silencieuse et tenace, la lutte des derniers chasseurs-cueilleurs de Thaïlande.


I. La chasse traditionnelle des Maniqs : un rite ancestral, une respiration vitale

Dans les arbres majestueux de Pa Bon, où la lumière se faufile à travers des milliers de feuilles, un jeune homme court.
Il s’appelle Thawee.
Dix-huit ans seulement, mais dans son regard brûle la lueur immémoriale des Maniqs.

Il avance pieds nus, la sarbacane en main comme une prolongation de son souffle. Le groupe le suit, leurs voix se mêlant aux bruissements de la forêt. Celle-ci semble retenir son souffle lorsque Dan ajuste sa flèche enduite de poison traditionnel. Elle traverse l’air dans un chuchotement, et un singe tombe avec une douceur presque rituelle — comme une offrande rendue au cycle de la vie.

Pour les Maniqs, chasser n’est pas dominer :
c’est dialoguer avec la forêt.
La proie est un don, jamais une victoire.

Dan rapporte l’animal sous le thap, cet abri de bambou tressé, et partage la viande selon un code immuable où chacun reçoit selon la taille de sa famille.

« Je suis heureux chaque fois que je pars en chasse. C’est notre nourriture, notre manière de vivre. »

Pourtant ici, la chasse est interdite.
La législation thaïlandaise transforme un geste ancestral en délit.

Ironie cruelle :
partout dans le monde, les peuples autochtones protègent la biodiversité mieux que beaucoup d’États modernes.

Même les autorités le confirment :
« Le mode de vie des Maniqs n’est pas un danger. Ils ne détruisent pas la forêt. »

Non.
Ils l’habitent comme un souffle habite un corps.


II. Les Maniqs : un peuple en mouvement depuis des siècles

Les Maniqs appartiennent à la grande famille des Negritos, l’une des lignées humaines les plus anciennes de la péninsule malaise. Pendant des siècles, ils ont suivi le rythme sacré de la forêt tropicale, nomades des pluies et des saisons. Un camp aujourd’hui, un autre demain, glissé entre vallées, clairières et songes.

La forêt n’était pas un territoire :
c’était le monde.

Aujourd’hui, ils ne sont plus que 415, selon les organisations dédiées aux peuples autochtones. Beaucoup vivent désormais sédentarisés, à la lisière des forêts du sud thaïlandais. La modernité les a rattrapés, souvent sans leur consentement : santé, éducation, électricité, aides publiques. Mais avec ces portes ouvertes viennent les chaînes économiques.

Les hommes travaillent dans les plantations d’hévéa pour quelques dollars quotidiens. Les femmes tressent des sacs en feuilles de pandan. Les enfants apprennent à lire, à écrire, à compter — à entrer dans un autre univers.

« Aujourd’hui, je peux écrire mon nom », dit un enfant.
Et sa mère raconte avoir senti une chaleur nouvelle dans sa poitrine.

Écrire son nom, c’est exister dans le monde moderne.
Mais c’est aussi s’éloigner doucement de la forêt.
Et certains redoutent ce chemin.


III. Entre traditions et modernité : un peuple sur un seuil fragile

Kamol Booncharoen, chef d’une communauté de quarante personnes, raconte :
« Tout ce dont nous avions besoin était dans la forêt. Aujourd’hui, tout s’achète. »

Tout :
le riz, la viande, les légumes, les outils.

Ce qui ne s’achète pas — la dignité, l’identité, la mémoire — doit se défendre.

Les Maniqs réclament un droit simple :
vivre dans leurs forêts ancestrales, construire des maisons, cultiver quelques légumes, demeurer sur leurs terres comme des êtres humains et non comme des visiteurs sous permission.

Mais les zones protégées thaïlandaises interdisent toute propriété privée. Ils n’obtiennent que des permis temporaires — vingt ans tout au plus. Une parenthèse minuscule face aux millénaires qui les précèdent.

À Plai Khlong Tong, dans la province de Trang, certains vivent depuis plus de trente ans. Ils ont bâti des maisons, planté des hévéas. Pourtant, leur statut demeure précaire.

« Nous avons besoin de permission pour tout. Même pour couper un arbre. »

Un peuple qui n’a jamais réclamé la terre doit désormais prouver qu’il mérite de rester.


IV. Des vies précaires, fragiles, mais toujours debout

Dans la province de Satun, la situation est dramatique.
Un groupe Maniq mendie au bord des routes : la forêt a disparu, avalée par les machines.

« Il n’y a plus rien dans la forêt », dit leur cheffe, Jin Sri Thung Wa.

La discrimination persiste : on les traite de “sauvages”.
Mais Banjit répond, digne :
« Nous sommes un peuple de la forêt, pas des sauvages. »

Dans certaines plantations d’hévéa, des propriétaires leur offrent un coin de terre. Une générosité réelle, mais fragile comme une promesse non écrite.

Les enfants vont à l’école grâce à un employé de la plantation.
Narisara, 13 ans, étudie avec des enfants de sept ans, mais elle sait écrire son nom.
Et elle rêve :

« Quand je serai grande, je veux gagner de l’argent pour ma mère, pour la rendre heureuse. »

Même dans le manque, l’espoir persiste.


V. Zones ethniques protégées : une promesse encore floue

En septembre, une nouvelle loi thaïlandaise annonce la création de zones ethniques protégées.
Une expression belle comme une promesse : un havre pour les peuples autochtones.

Les Maniqs n’auraient pas de titres de propriété, mais pourraient bénéficier de droits d’usage permanents.

« La sécurité ne passe pas toujours par la propriété », explique un anthropologue.

Mais un député Hmong nuance : les restrictions environnementales demeurent strictes, et les services forestiers conservent le contrôle des autorisations essentielles — eau, électricité, routes.

Au fond, la législation foncière n’a guère changé.


VI. Crépuscule et aube : le souhait profond des Maniqs

Au coucher du soleil sur les plantations d’hévéa, les enfants étudient sous la lumière fragile d’une lampe-torche. La forêt murmure autour d’eux, fidèle, inquiète, vivante.

« Cette terre nous est donnée temporairement », dit Banjit.
« Nous voulons une maison où vivre pour toujours. »

Une maison.
Un lieu où la pluie frappe sans menace.
Une terre où l’on plante un arbre sans craindre de partir avant qu’il porte fruit.
Une forêt où chasser sans se cacher.
Un ciel où l’on n’est pas un intrus.

Le monde moderne avance vite.
Trop vite pour ceux qui suivent encore le tempo ancien des saisons.

Mais les Maniqs ne renoncent pas.
Ils avancent, discrets, obstinés, guidés par la mémoire et la forêt.

Ils demandent une chose simple, immense :
le droit de rester eux-mêmes.

Dans la nuit de Pa Bon, une lumière persiste :
celle de la détermination, de la dignité, de la survie.

Peut-être qu’un jour, si les lois apprennent à écouter ce que les arbres savent déjà, les Maniqs pourront vivre en paix sur la terre qui est la leur depuis toujours —
non en propriétaires, mais en fils et filles de la forêt.

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